Mercredi 9 novembre 2016, la Cour de cassation a condamné l’Etat à raison de contrôles d’identité « au faciès ». La juridiction judiciaire suprême a rappelé dans un communiqué qu’un « contrôle d’identité fondé sur des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable, est discriminatoire ». Pour les sages, « il s’agit d’une faute lourde qui engage la responsabilité de l’Etat ».
A l’occasion de son arrêt (n°1245, 1re chambre civile), la Cour a précisé la façon dont la discrimination doit être prouvée. Il s’agit d’un aménagement de la charge de la preuve en trois temps :
- la personne qui a fait l’objet d’un contrôle d’identité et qui saisit le tribunal doit apporter au juge des éléments qui laissent présumer l’existence d’une discrimination ;
- c’est ensuite à l’administration de démontrer, soit l’absence de discrimination, soit une différence de traitement justifiée par des éléments objectifs ;
- enfin, le juge exerce son contrôle.
Dans le cas d’espèce, treize personnes estimaient avoir fait l’objet d’un contrôle d’identité fondé uniquement sur leur apparence physique, la Cour de cassation a constaté que la cour d’appel avait correctement appliqué cette méthode. C’est à dire que l’Etat a été condamné lorsqu’il n’a pas démontré que la différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs. L’Etat n’a pas été condamné lorsque la différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs : la personne contrôlée correspondait au signalement d’un suspect recherché.
L’Etat n’a pas non plus été condamné lorsque la personne contrôlée n’a pas apporté les éléments de fait qui traduisaient une différence de traitement et laissaient présumer l’existence d’une discrimination. Pour la Cour, « l’invocation de statistiques qui attestent de la fréquence de contrôles effectués sur une même catégorie de population appartenant aux minorités visibles ne constituait pas, à elle seule, une preuve suffisante ». D’autant que les témoignages apportés ne mettaient pas en évidence une différence de traitement.
Sur cette base méthodologique, onze des pourvois formés contre les arrêts de la cour d’appel sont donc rejetés. Dans deux affaires, cependant, l’arrêt est cassé. Dans un cas, pour non-respect d’une règle de procédure civile indépendante de la question des contrôles d’identité. Dans l’autre, parce que la cour d’appel n’a pas recherché si la différence de traitement n’était pas justifiée par des éléments objectifs apportés par l’administration.