A l’occasion de trois affaires distinctes (une affaire de travail dissimulé et deux affaires de banqueroute) dans lesquelles ont été déclarés irrecevables l’appel de requérants contre des ordonnances du juge des libertés et de la détention les ayant placé sous contrôle judiciaire (aff. 2018-758, 2018-759, 2018-760), la Cour de cassation a saisi le Conseil constitutionnel le 24 octobre 2018 d’une question prioritaire de constitutionnalité relative aux dispositions de l’article 394 du code de procédure pénale.
La haute juridiction demande aux sages si les dites dispositions portent atteinte au droit au recours effectif et au principe de l’égalité des armes garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ainsi qu’au principe de clarté de la loi garanti par l’article 34 de la Constitution, en ce que ni cette disposition, ni aucune autre du code de procédure pénale n’exclut ni ne prévoit le droit d’appel d’une ordonnance de placement sous contrôle judiciaire prononcée par le juge des libertés et de la détention alors que, selon l’interprétation qui en est faite par la jurisprudence de la Cour de cassation, l’appel appartient au seul ministère public à l’exclusion du prévenu.
L’article 394 du code de procédure pénale, rappelle la chambre criminelle de la Cour de cassation, ne prévoit ni n’exclut aucun recours contre les ordonnances du juge des libertés
et de la détention statuant sur le placement sous contrôle judiciaire ou assignation à résidence d’un prévenu invité à comparaître devant le tribunal correctionnel. La haute juridiction en déduit que ce texte n’ouvre pas au prévenu la voie de l’appel contre ces ordonnances, prenant en compte le fait que celui-ci a la possibilité de faire examiner, sans délai, sa situation
par une juridiction distincte en saisissant le tribunal correctionnel afin de solliciter la mainlevée ou la modification de ces mesures.
La Cour de cassation admet, en revanche, l’appel du ministère public contre ces mêmes ordonnances du fait de son droit d’appel général, de son rôle spécifique de défense de l’intérêt général et de l’absence, en ce qui le concerne, de toute autre possibilité de remettre en cause la décision du juge des libertés et de la détention.
Autant de considérations qui peuvent permettre de retenir que l’article 394 du code de procédure pénale, tel qu’interprété par la Cour de cassation ne porte pas atteinte au droit à un recours effectif ou au principe d’égalité constitutionnellement garantis. Il revient cependant au seul Conseil constitutionnel de se prononcer sur ce point de sorte que la question, non dépourvue de sérieux, a dû lui être transmise.