Alternatives à la détention : la Cour des comptes se penche sur les TIG et la DDSE
Le rapport de la Cour des comptes, publié le 4 mars 2025, évalue deux peines alternatives à l’incarcération : le travail d’intérêt général (TIG) et la détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE). Ces mesures, visant à réduire la surpopulation carcérale, concernaient début avril 2024 environ 22 000 personnes pour le TIG et 18 000 pour la DDSE, soit près de la moitié de la population carcérale.
Contexte et enjeux
En France, la surpopulation carcérale est un problème structurel. Afin d’y remédier, les autorités ont développé des peines alternatives à l’incarcération, dont le TIG et la DDSE.
Début avril 2024 :
- Environ 22 000 personnes exécutaient une peine de TIG.
- Environ 18 000 personnes étaient en DDSE
Ces mesures représentent environ 50 % de la population carcérale, mais elles peinent encore à s’imposer comme des peines autonomes.
Constats principaux du rapport
Le TIG et la DDSE sont sous-utilisés comme véritables alternatives :
- Le TIG, bien qu’encouragé depuis 2019, est en recul par rapport à 2015.
- La DDSE est majoritairement utilisée pour aménager des peines prononcées initialement comme de l’emprisonnement ferme, et non comme une alternative dès la condamnation.
- Pourquoi ?
- La diminution des primo-délinquants : une grande partie est orientée vers des alternatives aux poursuites (ex : rappel à la loi, stages).
- Le manque d’outils d’aide à la décision pour les magistrats : ils ont des difficultés à identifier les profils adaptés.
Des délais et un contrôle insuffisants
- Le TIG souffre de délais d’exécution trop longs entre le prononcé et le début de la peine.
- Cela réduit l’effet immédiat de la sanction et donc son efficacité.
- Le suivi des condamnés en DDSE est lacunaire :
- Moins de contrôles physiques sur le respect des obligations.
- Moins de sanctions en cas de non-respect, ce qui affaiblit l’effet dissuasif de cette peine.
Un impact limité sur la récidive et la réinsertion
- Le taux de récidive après un TIG est d’environ 60 % sur 5 ans, soit un niveau comparable à celui des peines de prison ferme.
- La DDSE semble plus efficace pour limiter la récidive, mais son effet reste incertain faute d’évaluations plus approfondies.
- Manque d’accompagnement vers la réinsertion :
- Pas assez de liens avec des dispositifs d’insertion sociale et professionnelle.
- Peu d’initiatives pour suivre les sortants du système pénal et éviter qu’ils ne récidivent.
Recommandations de la Cour des comptes
Pour que ces mesures deviennent de véritables alternatives efficaces à la prison, la Cour recommande :
1. Renforcer l’utilisation du TIG et de la DDSE comme peines autonomes. Mieux former les magistrats et leur fournir des outils d’évaluation adaptés pour orienter les condamnés vers ces peines. Mieux faire connaître les possibilités de prise en charge en milieu ouvert.
2. Améliorer les délais et le contrôle de l’exécution des peines. Réduire le temps entre la condamnation et l’application effective du TIG. Augmenter le nombre de contrôles pour s’assurer du respect des obligations (ex : visites domiciliaires pour la DDSE).
3. Mieux accompagner les condamnés pour prévenir la récidive. Mettre en place des programmes de réinsertion adaptés (formations, emploi, accompagnement social). Développer des partenariats avec les acteurs de l’insertion (associations, entreprises, collectivités).
Conclusion
Le TIG et la DDSE n’ont pas encore atteint leur plein potentiel en tant qu’alternatives crédibles à l’incarcération. Si elles permettent de réduire la pression carcérale, leur mise en œuvre souffre de délais trop longs, d’un manque de contrôle et d’une faible efficacité en matière de réinsertion. Pour que ces alternatives fonctionnent réellement, il est nécessaire : d’améliorer leur utilisation dès le prononcé de la peine, de renforcer le suivi des condamnés et d’intégrer un véritable accompagnement vers la réinsertion.
Ces réformes pourraient rendre la justice pénale plus efficace et mieux adaptée aux défis de la récidive et de la surpopulation carcérale.
Source : Rapport de la Cour des comptes, 4 mars 2025. Lire le rapport complet.