A l’occasion d’un litige, le Conseil d’Etat vient de confirmer que le seuil minimum de rémunération, fixé selon un barème établi annuellement par l’administration, « constitue non pas un salaire minimum individuel, mais un minimum collectif moyen de rémunération ». Ces modalités de rémunération, relatives à l’organisation du service public pénitentiaire doivent, pour être opposables aux personnes détenues, « être portées à leur connaissance, en même temps que les taux horaires de rémunération, par un affichage suffisant accessible à l’ensemble des détenus », ont poursuivi les magistrats.
Eu égard à la situation particulière de ces derniers, il doit également être fait référence à ces modalités de rémunération, ainsi qu’aux conditions particulières de leur exécution applicables à chaque personne détenue exerçant une activité professionnelle, dans le support de l’engagement au travail ou dans l’acte d’engagement signé avec le directeur de l’établissement pénitentiaire, a ajouté le Conseil d’Etat dans sa décision (n°380540, 7 mars 2016).
Dans cette affaire, le requérant a, d’avril à novembre 2009, occupé un emploi d’opérateur de façonnage au sein de l’atelier du centre pénitentiaire de Caen, concédé à la société Francepack sous le régime de la concession de main d’oeuvre pénale. Le « support d’engagement au travail » signé le 25 mars 2009 par le directeur de ce centre pénitentiaire et le détenu précisait que la rémunération de cet emploi serait « conforme aux tarifs affichés, soit sur le poste proposé d’opérateur sur la base d’un tarif horaire de 3,90 euros ».
Constatant que la rémunération qui lui avait été versée pendant toute la période ne correspondait pas au résultat de la multiplication de ce taux horaire par le nombre d’heures mentionné sur ses bulletins de paie, le requérant a saisi le tribunal administratif de Caen d’une demande tendant à la condamnation de l’Etat à lui verser une somme de 891,90 euros en réparation des préjudices qu’il estimait avoir subis. Le tribunal ayant rejeté son recours, il s’est pourvu en cassation.
Pour rejeter la demande indemnitaire du requérant, le tribunal administratif de Caen s’est fondé sur ce qu’il résultait de l’article 7.1 des clauses et conditions générales d’emploi de détenus par les entreprises concessionnaires et des stipulations du contrat de concession conclu entre l’Etat et la société Francepack, que la rémunération versée au détenu était calculée sur la base du seuil minimum de rémunération, fixé à 3,90 euros pour l’année 2009, « lequel constituait, non pas un salaire minimum individuel, mais un minimum collectif moyen de rémunération », a relevé le Conseil d’Etat.
Sauf qu’en jugeant ainsi nécessairement que les modalités de rémunération prévues par les clauses et conditions générales d’emploi de détenus et les stipulations du contrat de concession étaient opposables au requérant, sans rechercher si, contrairement à ce que soutenait celui-ci, ces modalités avaient été portées à sa connaissance de manière suffisante, dans les conditions qui viennent d’être mentionnées, « le tribunal a entaché son jugement d’erreur de droit », ont jugé les sages du Palais-Royal qui lui ont renvoyé l’affaire.
Les modalités de rémunération des personnes détenues employées par les entreprises sous le régime de la concession de main d’oeuvre pénale résultent, en particulier, des dispositions, arrêtées par le ministre de la justice en application de l’article D. 104 du code de procédure pénale, fixant les conditions générales d’emploi de détenus par les entreprises concessionnaires, ainsi que des conventions de concession passées entre l’Etat et ces entreprises et des documents auxquelles celles-ci se rapportent, a rappelé le juge administratif suprême.